In Francia, la scuola sciopera contro la politica dei tagli che il governo Raffarin,

ha programmato per i prossimi mesi.

 

Les enseignants accentuent la pression après le succès de leur grève


• LE MONDE | 18.10.02 | 11h58

Khadra se sent trompée. Aide-éducatrice depuis 1998 dans une école primaire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), elle arrive en fin de contrat en juin 2003. "Après cinq ans de bons et loyaux services, on nous met dehors de manière brutale, explique-t-elle. On est des bouche-trous". Khadra fait partie des 20 000 aides-éducateurs dont le contrat se terminera à la fin de l'année scolaire. En ce jeudi 17 octobre après-midi, elle n'a pas hésité à braver la pluie pour participer à la manifestation parisienne (10 000 personnes selon la police, 15 000 selon les organisateurs) contre la politique du gouvernement en matière d'éducation. Et ce n'est pas son problème, si, avec les emplois-jeunes, Luc Ferry récupère la gestion d'un dossier initié par le gouvernement précédent. "On fait tout, précise Khadra. Dans l'école, nous avons remis à neuf la bibliothèque, nous animons l'atelier informatique, faisons de l'aide au devoir, de l'encadrement scolaire pour les enfants en difficulté, accompagnons les sorties, les activités sportives..."

Dans de nombreuses écoles, "les aides-éducateurs sont devenus indispensables", assure Alexandra professeur des écoles en CM2. "Je ne sais pas vraiment pas comment on va se débrouiller sans eux." En tête du cortège, la longue banderole blanche, derrière laquelle se serrent une quinzaine de secrétaires nationaux des fédérations à l'origine du mouvement (FSU, UNSA-Education, SGEN-CFDT, FERC-CGT et FAEN) ou de leurs syndicats, mais aussi les présidents de la FCPE (parents d'élèves) et de l'UNEF (étudiants), reprend les trois grands thèmes de cette journée d'action : le budget, les emplois, la défense du service public. Aide-éducateurs, surveillants, conseillers principaux d'éducation, agents administratifs et techniques, infirmières mais aussi chercheurs ont défilé aux côtés des enseignants. Sur le refrain de Mon Amant de Saint Jean, ils ont déploré les suppressions de postes : "Comment ne pas perdre la tête, En voyant le dernier budget, Ces classes surchargées, Ces postes pas créés, Et ces congés non remplacés..." Sur l'air de C'est comme ça des Rita Mitsouko, ils ont dénoncé la "politique répressive" du gouvernement : "... Quand Devedjian, Sarkozy s'en mêlent Oh, Oh, il faut qu'on se bouge ! La répression des enfants, des mineurs Ah ça fait peur..."

"DES PIONS, PAS DES MATONS"

Parmi les slogans, plusieurs dénonçaient la priorité donnée par le budget à la police et la défense : "On veut des pions, pas des matons", "Du fric, du fric pour l'éducation, Non, non, non aux porte- avions". Pour Cyril, conseiller principal d'éducation, "la suppression de postes de surveillants va avoir des effets néfastes sur la vie des élèves". Dans son collège de Louvres (Val-d'Oise), Cyril se plaint qu'il n'y ait pas d'infirmière, pas de médecin scolaire, qu'il manque deux aides-éducateurs, et que plusieurs professeurs soient "vacataires", c'est-à-dire précaires. Alexandra, surveillante à mi-temps dans une cité scolaire à Paris, s'inquiète, elle, de la suppression de son gagne-pain. "Je prépare l'agrégation de philo et j'ai besoin de temps. Avec ce travail, la situation est idéale mais si on supprime mon poste, je vais devoir trouver un travail ailleurs", explique-t-elle.

Sur une caricature géante, un Luc Ferry très ressemblant, costume-cravate et petites lunettes, tient une arme de tir dans la main droite, façon James Bond. En grosses lettres, on peut lire : "Surveillants, emplois jeunes = fini ! A quand les flashballs pour les profs ?" Même si "Raffarin" est souvent cité dans les slogans, c'est le ministre de l'éducation qui cristallise les critiques. "Reprenez Ferry ! Rendez-nous Allègre !" ironise un enseignant dans les rangs de SUD-Education, déclenchant l'hilarité collective. Jean, professeur dans un collège du 5e arrondissement de Paris, avait manifesté contre Allègre, en 2000. "Il a brisé notre aura, on va mettre 15 ans à s'en remettre mais il avait raison sur le fait qu'il faut mener des réformes", estime-t-il. "Ferry, lui, a été de tous les plans. Il n'a rien remis en cause. C'est un homme usé, sans projet, qui continue ses petits bricolages comme les itinéraires de découverte. Soit il n'a pas d'idées, soit il ne veut pas les dire, soit il ne sait pas où il va", assène avec calme cet enseignant de 54 ans. Pour Claire, professeur dans un collège d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), "il est surtout très doué pour faire passer la pilule. Au début, il a affiché la continuité avec Jack Lang. Au final, ça n'est pas vraiment le cas. Tout cela manque de visibilité." D'autres estiment tout simplement que Luc Ferry "subit plus qu'il n'impose", comme l'affirme Yann, jeune enseignant de lettres et histoire, qui voit surtout en lui un "homo mediaticus". "C'est sans doute un homme plein de bonnes intentions, habile à réfléchir mais décalé par rapport à la réalité,renchérit un peu plus loin François, professeur de lettres dans un collège de Meaux (Seine-et-Marne). Il ne dirige pas la manœuvre et est en train de se laisser avoir. On entend plus Xavier Darcos que lui."

La façon dont les ministres gèrent le dossier de la décentralisation est souvent mise en cause. Les personnels Atoss (personnels administratifs, techniques, ouvriers, de santé et de service) s'estiment particulièrement visés et redoutent de voir la gestion de leurs métiers déléguée aux régions. "Nous manquons totalement d'informations, nous ne savons pas ce qu'on va devenir, déclare Norbert, 32 ans, cuisinier dans un collège à Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne). Si on nous donne aux régions, on risque de toucher à nos formations, à nos acquis." A ses côtés, Patricia, gardienne dans un lycée de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), craint une dégradation de ses conditions de travail, "déjà difficiles": "Je fais 43 heures par semaine pour compenser le fait qu'on me loge. Avant l'application des 35 heures, j'en faisais 50. Je vis dans un tout petit logement avec mes trois enfants. Avec la décentralisation, je ne sais pas comment tout ça peut tourner."

A un an de la retraite, Marie-Claude, intendante dans un établissement scolaire parisien, s'inquiète surtout pour ceux qui suivront : "Nous avons eu de belles carrières, mais je ne suis pas sûre que mes jeunes collègues aient les mêmes perspectives."

"PRIVATISATION DES CANTINES"

A Lyon, après les déclarations de la présidente UDF de la région Rhône-Alpes, Anne-Marie Comparini, revendiquant le transfert complet du bloc éducatif, quelque 2 000 enseignants et personnels éducatifs étaient dans la rue pour dire avant tout leur opposition à la "décentralisation-régionalisation" de l'éducation et à la remise en cause de "l'égalité républicaine". "Nous ne voulons pas d'un démantèlement du système éducatif français, estime un professeur de sciences-éco du lycée de Saint-Genis-Laval (Rhône). Le projet du gouvernement de transférer des compétences va creuser les inégalités entre les régions et contribuera à détruire le caractère national de l'enseignement et des diplômes."

A ses côtés, un technicien de laboratoire explique qu'il ne veut pas "être mangé par la Région". "J'ai été engagé par l'Etat. On est en train de rompre mon contrat. En transférant les missions des personnels Atoss aux régions, cela ouvrirait la voie à leur privatisation. On a vu ce que donnait la privatisation des cantines : les enfants défavorisés ne mangent plus. Luc Ferry veut tuer l'école de Jules Ferry."

Martine Laronche et Marie-Laure Phélippeau, avec Sophie Landrin à Lyon


Le baiser empoisonné de Jack Lang

Alors que Luc Ferry fait l'objet de critiques au sein du gouvernement pour ne pas avoir suffisamment marqué la rupture avec Jack Lang (Le Monde du 18 octobre), l'ancien ministre socialiste s'est fendu d'une déclaration de "reconnaissance" envers son successeur. Sur les ondes de France-Info, jeudi 17 octobre, M. Lang a salué le choix de M. Ferry de "poursuivre les réformes que nous avons engagées". "C'est une bonne chose", a-t-il expliqué ajoutant que l'actuel locataire de la Rue de Grenelle "y avait apporté sa contribution". M. Lang a cependant regretté que "le même esprit de continuité n'ait pas prévalu sur le plan budgétaire", précisant que "cela dépassait la personne de M. Ferry". "De manière générale, l'ensemble des ministères culturels liés à l'avenir de la jeunesse (...) subit des coupes très sévères", a-t-il expliqué. Selon le député (PS) du Pas-de-Calais, "ce n'est pas un bon choix qu'un gouvernement sacrifie ces dépenses d'avenir, au bénéfice de crédits militaires ou au bénéfice de baisses d'impôt en faveur des plus privilégiés".

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 19.10.02


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